MwSOUL

MwSOUL
  • 2017
  • W.E.R.F. Records / La Baleine

Ghalia Benali, un air de révolution dans la voix

La chanteuse belgo-tunisienne présente son nouvel album au festival Au Fil des Voix

D'origine tunisienne, née en Belgique, la chanteuse Ghalia Benali vient présenter son attrayant nouvel album MwSOUL. Elle l'a enregistré et le chante sur scène avec le groupe Mâäk, un collectif cuivré de jazz, mené par le trompettiste Laurent Blondiau. Elle le chante, le réinvente, face au public, captivante d'expressivité, se mettant dans la peau du texte comme elle le ferait dans celle d'un personnage de film. Le cinéma est justement une autre de ses cordes. Elle a joué dans La Saison des hommes (Mofida Tlatli, 2000), Swing (Tony Gatlin, 2002), A peine j'ouvre les yeux (Leyla Bouzid, 2015) et Fatwa (Mahmoud Ben Mahmoud, co-produit par les frères Dardenne, pas encore sorti). "MwSOUL, cela signifie "connexion", explique la chanteuse, dans le sens spirituel du terme." L'idée de cet album a germé au moment des mouvements de contestation populaire de "printemps arabe". "Depuis la Belgique, je me connectais via les réseaux sociaux avec des gens pour parler de ce qui se passait dans nos pays. Je voulais entendre ce que les gens sentaient. C'était la première fois que je commençais vraiment à avoir de nouveau un contact avec le monde arabe. Je passais des soirées entières à discuter sur Facebook, à parler poésie avec des jeunes de 20 ans qui écrivaient des textes et me les faisaient partager." L'auteur du titre qui donne son nom à l'album, Abdallah Ghoneem, est égyptien. Il avait 22 ans à l'époque. d'autres sont tunisiens, syriens, irakiens, iraniens. Ghalia Benali a mis en musique ces mots (traduits de l'arabe en anglais sur la jaquette de l'album), avec le groupe Mâäk aux arrangements de cuivres. "C'était la révolution qui nous mettait tous ensemble, poursuit la chanteuse. Je découvrais du texte contemporain, moi qui étais toujours lié à du texte ancien. Les écrits de ces jeunes auteurs portent du souffle et l'expression d'une prise de conscience. On sent que quelque chose a switché."

Avant la "révolution", elle chantait surtout d'anciennes chansons, d'anciens poèmes, ramenés de Tunisie. Elle a chanté aussi, magnifiquement, le répertoire d'Oum Kalthoum (écouter Ghalia Benali sings Oum Kalthoum, paru en 2010)? La Belgique, elle y est née en 1968, l'a quittée à 4 ans, avec ses parents partis s'installer à Zarzis, une petite ville portuaire dans le sud tunisien, puis y est revenue à 19 ans. Pour suivre des études de graphisme. "Graphiste de formation, je suis venue à la musique par hasard, même si je chante depuis toujours." Elle se produit pour la première fois sur scène en 1996, en Belgique, avec le joueur de oud tunisien Moufadhel Adhoum (présent sur MwSOUL) et sort son premier album, Wild Harissa, en 2001. Quand elle est arrivée en Belgique, à la fin des 1980, c'est l'époque où "en Europe, les musiques du monde intéressent et se développent. J'avais l'impression que je devais parler de ma culture et la confronter à d'autres, en mettant en avant ce qui nous réunit." Un désir de "connexion", déjà.

Patrick Labesse, Le Monde, 27 janvier 2018

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